Polygon Created with Sketch. Blog

Investir dans les préposées et préposés aux services de soutien à la personne est essentiel pour l’avenir des soins de longue durée

La pandémie de COVID-19 a fait ressortir la stigmatisation publique associée au vieillissement et aux soins de longue durée. Trop souvent, les personnes âgées sont décrites comme des « personnes fragiles » et les maisons de soins de longue durée comme des « établissements ». Ces notions ne reconnaissent pas la diversité, les forces et les contributions des personnes âgées. Elles évoquent également des représentations de placement des personnes âgées en institution. Malheureusement, cette impression de placement des personnes âgées n’est pas sans fondement, comme en témoigne le rapport sur les résidences de soins de longue durée en Ontario publié au début de la pandémie par les Forces armées canadiennes (FAC).

Depuis des décennies, la communauté des chercheurs en gérontologie plaide en faveur de soins axés sur la personne lors de la prestation de soins à domicile ou de soins de longue durée aux personnes âgées, en particulier celles souffrant de troubles cognitifs comme la démence. Une approche centrée sur la personne valorise le parcours de vie unique des personnes âgées et tient compte de leurs préférences lors des soins courants. Une approche centrée sur la personne valorise également les relations entre les personnes âgées et leurs partenaires de soins, qu’il s’agisse de la famille, des amis ou des prestataires de soins de santé officiels. Le rapport de la CAF a révélé plusieurs occasions manquées en matière de soins centrés sur la personne, où la dignité des résidents des établissements de soins de longue durée n’était pas une priorité. Par exemple, des résidents ont été inutilement sédatés et qualifiés d’« agités et difficiles » alors qu’ils n’avaient besoin que d’un lien social. D’autres résidents ont été observés en train de crier à l’aide, le personnel ne répondant pas, dans certains cas, pendant plus de deux heures. Ces exemples devraient nous inciter à réfléchir. Souhaiterions-nous ce type de soins pour les membres de notre famille ? Pour nous-mêmes ?

Le rapport de la CAF et la vaste couverture médiatique de l’impact de la pandémie de COVID-19 sur la qualité des soins dans les résidences de soins de longue durée offrent plusieurs domaines tangibles d’amélioration. Il est opportun de les utiliser comme point de départ pour transformer le système de soins de longue durée afin qu’il soit centré sur la personne. L’un des domaines les plus importants qui nécessitent une amélioration immédiate est la formation du personnel de première ligne, en particulier des préposés aux services de soutien à la personne.

Les préposés aux services de soutien à la personne (PSP) fournissent les soins formels les plus directs dans les établissements de soins à domicile et de soins de longue durée. Pourtant, les besoins complexes en matière de soins des personnes âgées dans ces contextes dépassent de loin l’éducation, la formation et les capacités formelles des préposés aux services de soutien à la personne pour maintenir des niveaux élevés de soins de qualité. Les programmes d’éducation et de formation existants pour les PSP mettent principalement l’accent sur les tâches de soins, telles que l’alimentation et les soins de propreté, et accordent peu d’attention aux besoins de communication des personnes âgées, en particulier celles dont la communication est altérée par l’audition, la vision et le déclin cognitif. 

La communication entre le personnel et les résidents a été caractérisée dans le rapport CAF comme étant principalement axée sur les tâches et trop directive. En effet, l’éducation et la formation du personnel de première ligne sont un élément clé de la récente stratégie canadienne sur la démence. Les préposés aux services de soutien à la personne passent beaucoup de temps avec les résidents et les clients des soins à domicile par rapport aux autres professionnels de la santé. En dotant les PSP d’une éducation et d’une formation sur la démence fondées sur des données probantes, on peut directement améliorer la qualité de vie des résidents et des clients des soins à domicile et réduire les coûts globaux des soins de santé (par exemple, réduire l’épuisement du personnel, réduire la surconsommation de médicaments). 

La pandémie de COVID-19 a fait ressortir l’importance de la communication et du lien social pour tous les membres de la société, en particulier pour les personnes âgées nécessitant des soins formels, tant dans les maisons de soins de longue durée qu’à leur propre domicile. Toutes les activités de soins, des soins personnels (par exemple, l’aide à l’alimentation ou à la toilette) à l’évaluation de la douleur, nécessitent une communication. Une formation du personnel axée sur la personne est essentielle en cas de pandémie. En s’appuyant sur plus de 25 ans de données probantes et sur un financement récent du Centre des Compétences futures (CCF), du Centre for Aging and Brain Health Innovation et du Fahs-Beck Fund for Research and Experimentation, notre équipe de recherche a mis au point et testé une formation à la communication centrée sur la personne, appelée Be EPIC, destinée au personnel de première ligne qui s’occupe de personnes atteintes de démence. Nous commençons notre formation par l’impact des stéréotypes spécifiques à l’âge et à la démence sur les interactions avec les personnes atteintes de démence. Cette approche valorise la dignité des personnes atteintes de démence et ne considère pas les plus vulnérables d’entre nous comme jetables. Une approche de la communication centrée sur la personne est à la base de toutes les rencontres de soins cliniques. C’est particulièrement important en cas de crise. Par exemple, les changements soudains associés aux épidémies, comme le déplacement d’une personne atteinte de démence d’une chambre à l’autre dans une résidence de soins de longue durée, peuvent déclencher des comportements tels que l’agitation, les questions répétitives ou les demandes d’aide constantes. Ces comportements sont des façons pour les personnes atteintes de démence de communiquer des besoins physiques ou émotionnels non satisfaits ou de communiquer un problème avec leur environnement physique ou social. Le personnel formé à l’utilisation d’une approche centrée sur la personne serait en mesure de prévenir ou de minimiser ces comportements en s’assurant que les besoins du résident sont satisfaits avant de procéder au changement de chambre. Il faut pour cela connaître l’histoire sociale unique du résident, y compris ses goûts et ses dégoûts, ainsi que les souvenirs marquants qui lui apportent du réconfort. 

Nous sommes heureux que le projet Be EPIC reçoive une série supplémentaire de financement prolongé de 1,021 million de dollars du CCF, comme annoncé le 10 mai, pour faire évoluer davantage le projet en utilisant la réalité virtuelle dans une approche innovante de la formation. C’est la preuve de la valeur de cette approche des soins aux personnes atteintes de démence. 

Il est important que nous investissions dans une formation centrée sur la personne pour tout le personnel des soins de longue durée. Un tel investissement a deux effets. Premièrement, il reconnaît que les personnes âgées sont des membres importants de notre société. Deuxièmement, il reconnaît la valeur du personnel de première ligne, en particulier des préposés aux services de soutien à la personne, en tant que membres clés de l’équipe de soins de santé et, plus important encore, en tant que fournisseurs d’interactions sociales enrichissantes et d’engagement pour les personnes âgées. La façon dont nous avons traité les personnes âgées et le personnel de santé de première ligne pendant cette pandémie est le reflet de notre vision stigmatisante des soins aux personnes âgées. Utilisons les leçons tirées de la COVID-19 pour investir dans les groupes de personnes les plus vulnérables et pour progresser en tant que société.

Marie Y. Savundranayagam, PhD, est professeure agrégée à l’École des études sur la santé et directrice de l’Unité de recherche Sam Katz sur la santé communautaire et le vieillissement, à la Faculté des sciences de la santé de l’Université Western.

Les points de vue, les réflexions et les opinions exprimés ici sont ceux de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement le point de vue, la politique officielle ou la position du Centre des Compétences futures ou de l’un de ses membres du personnel ou des partenaires du consortium.