État des compétences
Exploiter les compétences des nouveaux arrivants
Perspectives Clés
La qualité et l’intensité de l’engagement des employeurs sont essentielles à la réussite globale des interventions visant à soutenir les nouveaux arrivants. L’engagement des employeurs ne doit pas se limiter à « cocher une case » et doit être systématisé à chaque phase d’un projet.
Les décisions relatives à la carrière et à la formation sont particulièrement complexes pour les nouveaux arrivants, compte tenu des difficultés qu’ils rencontrent dans l’apprentissage de nouveaux systèmes et de cultures professionnelles peu familières. Le soutien à l’évolution de carrière des nouveaux arrivants doit intervenir tôt et souvent.
De la sélection des nouveaux arrivants à leur arrivée au Canada, en passant par leur intégration sur le lieu de travail et le développement de leur carrière, le parcours est loin d’être simple et comporte de nombreux points de contact avec différents partenaires immigrés, associations et entités gouvernementales. Chaque étape est cruciale pour la réussite des nouveaux arrivants. Une collaboration forte et intégrée entre les partenaires et les acteurs du système est nécessaire.
L’enjeu
L’immigration fait partie intégrante de la réponse aux pressions sur la main-d’œuvre. D’ores et déjà, 23 % de la population canadienne est un immigrant reçu ou un résident permanent et plus de 80 % de la croissance de la population active du Canada provient de l’immigration. À mesure que la population canadienne vieillit, le rôle critique de l’immigration ne fera que s’intensifier. D’ici 2025, le Canada vise à accueillir 500 000 nouveaux arrivants, un objectif record qui reflète notre dépendance à l’égard de l’immigration pour assurer la croissance du marché du travail et de l’économie. Pourtant, lorsqu’ils s’installent, de nombreux nouveaux arrivants se retrouvent encore dans des emplois qui ne correspondent pas à leur expérience et à leurs qualifications. Les compétences et les expériences des nouveaux arrivants au Canada sont systématiquement sous-utilisées, ce qui compromet leur bien-être individuel ainsi que la compétitivité du Canada. Pour certains, il faut souvent des années avant de trouver un emploi qui leur convienne, tandis que d’autres n’y parviennent jamais. S’ils finissent par trouver un emploi, la discrimination ou les obstacles interculturels peuvent réduire leurs perspectives d’avancement, ce qui aggrave encore l’inadéquation des compétences.
Outre la reconnaissance formelle des compétences, un élément essentiel de l’expérience du nouvel arrivant est l’engagement dans l’ensemble des normes, des indices et des compréhensions culturelles qui relèvent de l’alphabétisation interculturelle. Selon une étude réalisée en 2019 par le Centre de recherche sur l’inclusion au travail de l’université Carleton, les nouveaux arrivants se sentent isolés et ont peu d’occasions de communiquer de manière informelle avec leurs collègues locaux, entre autres conséquences de l’incompréhension interculturelle. La méconnaissance de la culture du lieu de travail canadien peut ralentir leur capacité à s’intégrer dans l’organisation, à identifier les opportunités et à nouer des relations.
L’accès au capital social et les possibilités de réseautage et de développement professionnel sont des ingrédients essentiels du processus d’intégration des immigrants et peuvent être un facteur décisif pour déterminer si une personne trouve finalement un emploi dans le domaine choisi. Entre 70 et 80 %, des emplois sont décrochés grâce au réseautage. Toutefois, cela peut être difficile à obtenir pour les nouveaux arrivants qui ne savent pas toujours vers qui se tourner ou comment commencer à créer un réseau professionnel. Cette difficulté souligne la nécessité de rationaliser un processus d’intégration sociale et économique qui, autrement, pourrait prendre de nombreuses années.
Le coût d’une mauvaise exploitation des compétences des nouveaux arrivants va bien au-delà du coût individuel. Les employeurs et les entreprises du Canada sont constamment confrontés à des difficultés pour répondre à leurs besoins en compétences, ce qui peut compromettre notre capacité à atteindre nos objectifs économiques, environnementaux et sociétaux.
Ce que nous examinons
Un grand nombre de projets du CCF testent de nouvelles méthodes pour mieux exploiter les compétences des nouveaux arrivants. Cette perspective thématique examine en profondeur une série de trois projets qui adoptent chacun une approche unique sur la manière de mieux exploiter les compétences des nouveaux arrivants, y compris les tests :
● Si une approche rationalisée et axée sur des outils d’évaluation en ligne préalables à l’ arrivée peut rendre le processus d’évaluation des compétences et des acquis plus accessible et plus efficace pour les nouveaux arrivants qualifiés et les employeurs potentiels.
● Une série de pratiques sur le lieu de travail au niveau de l’entreprise pour améliorer l’alphabétisation interculturelle et les parcours professionnels des nouveaux arrivants au sein d’une entreprise existante.
● Si une approche fondée sur la communauté et les réseaux sociaux peut améliorer les perspectives d’emploi et les possibilités de développement professionnel pour les professionnels nouvellement arrivés.
Ce que nous apprenons
De nombreux nouveaux arrivants sont confrontés à la difficulté de reconnaître et d’exploiter pleinement leurs compétences. Il s’agit d’un processus complexe, et ces projets pilotes ont permis de comprendre comment construire de meilleurs parcours professionnels et encourager la reconnaissance des compétences chez les nouveaux arrivants.
La qualité et l’intensité de l’engagement des employeurs sont fondamentales pour l’intégration des nouveaux arrivants.
Trop souvent, l’engagement auprès des employeurs se limite à une consultation lors de la phase de lancement d’un projet. Les projets financés par le FSC ont intégré les besoins des employeurs dans la conception et la mise en œuvre des programmes grâce à des boucles de rétroaction intégrées entre les partenaires industriels et les organisations de projet, afin de garantir que les programmes d’accréditation et de recyclage des nouveaux arrivants répondent aux besoins des employeurs et les anticipent. Cela a permis de garantir que les compétences des nouveaux arrivants correspondent mieux aux besoins de l’industrie. Par exemple, dans le cadre du programme FAST de l’IEC-BC, les employeurs participent à l’élaboration du contenu de l’outil en ligne et veillent à ce qu’il évalue les compétences techniques et les connaissances culturelles nécessaires pour réussir dans chaque secteur et profession pour lesquels FAST a été développé.
Un engagement persistant et efficace auprès des employeurs est également essentiel pour surmonter les obstacles interculturels qui peuvent survenir lorsque les managers et les pairs ne répondent pas aux besoins des nouveaux arrivants. La situation s’aggrave lorsque les nouveaux arrivants, qui n’ont pas d’expérience professionnelle au Canada, ne connaissent pas la culture du lieu de travail. Le NERN NL regroupe un large éventail d’organisations professionnelles, d’employeurs, de prestataires de formation et de nouveaux arrivants, et facilite la collaboration et l’échange de connaissances. Ces efforts permettent de lutter contre l’isolement social et ont un impact positif sur l’embauche, le maintien et l’évolution de carrière des nouveaux arrivants.
Un soutien au développement de la carrière doit être fourni dès le début et souvent
Si l’on considère l’ensemble des projets, il est clair qu’une intervention précoce est essentielle pour mettre les nouveaux arrivants sur la voie de l’obtention d’un emploi correspondant à leur niveau de compétences dans un délai raisonnable.
Au-delà de cette intervention initiale, des efforts continus sont nécessaires pour éviter que le sous-emploi ne s’installe durablement. La dynamique du lieu de travail et les goulets d’étranglement interculturels entre les employeurs et les nouveaux arrivants, qui empêchent une communication ouverte, peuvent conduire à des cercles vicieux qui renforcent les obstacles empêchant les nouveaux arrivants d’atteindre leur plein potentiel. Cette situation accroît les difficultés que rencontrent les employeurs pour attirer, recycler et retenir les nouveaux arrivants dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Par exemple, le programme CAIP de TRIEC, avec son approche basée sur les ressources humaines au niveau de l’entreprise, favorise des cultures d’entreprise plus inclusives et une plus grande progression de carrière pour les employés nouvellement arrivés au sein des organisations.
La collaboration est essentielle dans un écosystème complexe d’immigrants
Pour les nouveaux arrivants, faire reconnaître les compétences, les qualifications et les titres internationaux peut prendre du temps et implique souvent plusieurs séries d’évaluations au cours de l’installation et de l’intégration. Les nouveaux arrivants sont confrontés à la tâche difficile de naviguer dans de nouveaux systèmes et de nouvelles cultures de travail. Les parcours professionnels des nouveaux arrivants au Canada comportent un certain nombre d’étapes, qui forment toutes un écosystème complexe, parfois fragmenté, au service des immigrants. Les premiers résultats de ces projets illustrent le fait que l’exploitation des compétences des nouveaux arrivants doit être considérée comme une préoccupation au niveau du système, plutôt que comme une approche ad hoc à chaque phase du parcours du nouvel arrivant. Les interventions efficaces sont fonction de la force et de l’intégration des partenariats entre de nombreux acteurs et organisations qui partagent l’objectif de faire progresser les nouveaux arrivants, mais qui n’ont pas forcément les mêmes moyens et les mêmes capacités pour y parvenir.
Pourquoi c’est important
L’immigration représente aujourd’hui la quasi-totalité de la croissance de la main-d’œuvre au Canada et devrait représenter la quasi-totalité de la croissance démographique d’ici 2032, tandis que le ratio national travailleurs/retraités passe de 7:1 à 2:1 d’ici 2035. Les enjeux d’une bonne intégration des nouveaux arrivants qualifiés sont importants. Le coût de l’incapacité à exploiter les compétences des nouveaux arrivants va au-delà de celui supporté par les individus, car les entreprises éprouvent constamment des difficultés à répondre aux besoins en compétences et à pourvoir les postes vacants, ce qui a des répercussions sur la croissance économique, la cohésion sociale et la qualité de vie au Canada.
Une partie du problème réside dans la meilleure façon de reconnaître et d’exploiter les compétences des professionnels nouvellement arrivés à un niveau formel. D’autres facteurs sociaux et culturels informels, tels que l’aisance interculturelle et l’accès au capital social, peuvent également avoir une incidence négative sur les trajectoires de carrière. Ces aspects plus subtils du processus d’intégration devraient être intégrés tout aussi bien dans les considérations politiques. Les perspectives présentées dans ce document peuvent aider à garantir que les futures interventions politiques prennent en compte les dimensions informelles et non formelles du parcours d’intégration d’un professionnel qualifié.
Les premiers résultats de ces projets soulignent également la nécessité d’élargir le champ de la collecte de données et des méthodes d’évaluation afin de mieux comprendre ce qui fonctionne. Pour ce faire, il faut davantage de ressources et de renforcement des capacités pour que les organisations, en particulier les petites organisations à but non lucratif, soient bien placées pour entreprendre, en collaboration avec des partenaires, le suivi et l’évaluation.
Les prochaines étapes
Alors que le Canada est confronté à des pénuries de main-d’œuvre, la capacité des employeurs à exploiter le capital humain des professionnels nouvellement arrivés restera une question d’une importance capitale. Dans l’ensemble, les projets présentés ici permettent de tirer des leçons et des enseignements susceptibles d’aider et d’informer les interventions futures. Ceux-ci laissent également la porte ouverte à des discussions plus approfondies sur la manière dont ces efforts peuvent être améliorés et mieux répondre aux complexités du fonctionnement d’un écosystème fragmenté et interdépendant de services aux immigrés.
Dans les mois à venir, des projets clés du CCF offriront plus de détails, y compris :
- Comment pouvons-nous améliorer l’intégration et la coordination de l’ensemble des mesures d’aide aux nouveaux arrivants, de la santé à l’emploi et au développement de carrière ?
- Quelles sont les compétences les plus pertinentes pour obtenir des résultats meilleurs et plus durables pour les entreprises et les nouveaux arrivants ?
- Comment améliorer l’expérience d’accueil des immigrants dans les petites et moyennes entreprises (PME) en dehors des grandes villes d’accueil ?
- Dans quelle mesure les aides linguistiques et autres aides spécifiques à la discipline du participant peuvent-elles améliorer les résultats sur le marché du travail ?
Ces projets à venir et les questions auxquelles ils répondent contribueront à notre connaissance collective de la meilleure façon d’exploiter les compétences et les expériences des nouveaux arrivants. Ainsi, notre système d’immigration répondra aux besoins de l’économie canadienne, permettra une meilleure adéquation entre l’offre et la demande de talents immigrés et réduira les niveaux de sous-emploi et d’exclusion sociale parmi les nouveaux arrivants.
Projets CCF inclus
AXIS Career Services: Newcomer Employment Resilience Network NL (NERNNL)
Des questions sur notre travail ? Souhaitez-vous avoir accès à un rapport en anglais ou en français ? Veuillez contacter communications@fsc-ccf.ca.
COMMENT CITER CE RAPPORT
Tobin, S. (2023) Rapport de perspectives de projet : Exploiter les compétences des nouveaux arrivants. Toronto : Centre des Compétences futures. https://fsc-ccf.ca/fr/projets/state-of-skills-newcomers/
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Ce rapport a été produit sur la base de projets financés par le Centre des compétences futures (CCF), avec le soutien financier du gouvernement du Canada. Les opinions et interprétations contenues dans cette publication sont celles de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement celles du gouvernement du Canada.