RAPPORT DE PERSPECTIVES DE PROJET

Impacts de l’intelligence artificielle pour l’emploi, la productivité et le développement des compétences au Québec

Partenaires

Institut du Québec

Emplacements

Québec

FONDS VERSÉS

50  000 $

Publié

Juillet 2025

Collaborateur

Steve Richter

Sommaire

Ce projet de recherche visait à produire un rapport sur les impacts de l’intelligence artificielle sur le marché du travail québécois. En particulier, l’équipe s’est tachée de classer tous les emplois actuels au marché du travail québécois et de préciser lesquels sont menacés par l’IA. Finalement, les conditions gagnantes pour le déploiement de l’IA ont été élaborées, ainsi qu’une liste des recommandations conséquentes aux parties prenantes. Pour atteindre ces objectifs, l’Institut du Québec s’est appuyé sur une méthodologie, déjà mise en œuvre par l’OCDE à l’international, et a réussi à l’adapter au contexte québécois.

Perspectives clés

Actuellement, la technologie d’intelligence artificielle n’est pas capable de remplacer les activités humaines, telles que l’intelligence sociale, la créativité (compétences dites transversales) ou d’autres tâches physiques complexes.

La présente étude a découvert qu’il y a 810 000 emplois – comprenant 96 métiers individuels – au Québec qui sont à haut risque d’automatisation par l’IA.

Les jeunes de 15 à 24 ans représentent le groupe qui est le plus à risque de perdre leur emploi à cause de l’automatisation par l’IA. La situation est encore préoccupante chez les jeunes ne poursuivant pas d’études postsecondaires.

La diplomation postsecondaire est la meilleure solution pour ne pas perdre son emploi à cause de l’automatisation. Ceci est en raison de la capacité de ceux et celles ayant une instruction postsecondaire de miser sur leurs nombreuses compétences transversales qui restent, pour l’IA, trop compliquées à maîtriser.

Pour que l’IA puisse augmenter la productivité de l’économie québécoise, elle ne doit pas s’employer uniquement dans le but de remplacer les humains.

L’enjeu

L’avancée technologique depuis l’époque industrielle a toujours suscité des craintes de la part des travailleurs dont les emplois risquaient de changer ou de se faire supprimer à cause de l’automatisation. L’arrivée de l’intelligence artificielle (IA) s’inscrit ainsi dans une longue histoire. Au départ, IA a été utilisée afin de reconnaître la voix ou l’écriture des humains, puis l’évolution lui a permis de pouvoir les comprendre et les analyser. Finalement, nous sommes rendus à un moment où certaines tâches complexes et peu répétitives (la génération de code informatique, par exemple) peuvent s’effectuer par l’IA, mettant ainsi en péril davantage d’emploi qu’on aurait pu croire intouchables il y a qu’à peine quelques années.

Depuis l’arrivée de l’IA générative (ChatGPT), l’adoption de la part du grand public a été fulgurante : en 2 ans, 39 % du public américain avait dit avoir utilisé l’IA générative, alors que l’utilisation d’autres technologies, comme le téléphone intelligent et les tablettes ont mis cinq ans pour atteindre le même pourcentage. Par contre, l’adoption de la part des entreprises canadiennes et québécoises a été moins impressionnante : seuls 12 % des Québécois l’a adoptée pour produire des biens ou des services. Toutefois, vu la puissance de l’IA générative, la question se pose : quelles en seront les conséquences ? Est-ce qu’on se fera remplacer par la machine au travail ? Si oui, quels métiers seront touchés ? Ce sont ce genre de questions auxquelles l’équipe de projet a essayé de répondre.

artificial intelligence (ai) and machine learning (ml)

Ce que nous examinons

Afin de savoir combien d’emplois pourraient être remplacés par l’IA, l’équipe de projet a employé une méthodologie déjà élaborée et utilisée par plusieurs chercheurs dans le domaine d’intelligence artificielle et de l’emploi. En particulier, les travaux de Frey et Osborne (2013) et l’OCDE (2019) – qui, de leur part, se sont intéressés aux impacts d’IA sur les emplois à travers le monde – ont été appliqués pour le contexte québécois. Spécifiquement, la méthodologie a permis à l’équipe de projet de cibler les métiers qui sont susceptibles d’être automatisés à plus de 70 % dans un avenir prévisible, un critère développé par Frey et Osborne (2013). De ce nombre, l’équipe a extrait les métiers pour lesquels une transition de carrière provoquée par l’automatisation est jugée « acceptable » selon l’OCDE, soit lorsqu’elle représente ou exige : 

  • Tout au plus six mois de formation avant de pouvoir occuper un poste qui n’est pas à haut risque d’être automatisé ; 
  • Une augmentation modeste des compétences en littératie et en numératie ; 
  • Des similarités dans les compétences exigées (compétences en technologie ou en gestion et en communication, par exemple) ; 
  • Au moins un domaine d’étude en commun avec l’emploi actuel ; 
  • Une réduction du salaire inférieure à 10 % ; 
  • Une surqualification limitée en matière de compétences en littératie et en numératie.

Ce que nous apprenons

Combien de travailleuses et travailleurs sont touchés ?
L’équipe a pu estimer que 810 000 travailleurs et travailleuses exerçant 96 métiers seraient menacés par l’avancée de l’intelligence artificielle. Ce groupe, qui représente 18 % de la population active au Québec, occupe des postes qui seront changés ou supprimés par l’IA à l’avenir. De plus, ce groupe ne peut pas facilement se requalifier pour un poste moins menacé par l’IA. Parmi ce groupe se répartissent des groupes individuels démographiques. Chez les hommes et les femmes, il a été découvert que, alors que les femmes représentent 48 % de la population au Québec, elles comptent pour 52 % de la main-d’œuvre vulnérable à l’automatisation. Chez les nouveaux arrivants, la situation n’est pas une surreprésentation dans la population vulnérable (comme c’est le cas chez les femmes), mais une sous-représentation. Ceux-ci représentent 26 % de la population active, mais 17 % de la population vulnérable. 

Les jeunes les plus à risque ?
Le pourcentage le plus élevé était celui des jeunes. En effet, ce groupe (15 à 24 ans) ne représente que 13 % de la population active, alors qu’il constitue 24 % de la main-d’œuvre menacée. Ce chiffre élevé est partiellement à cause du bon nombre de jeunes qui occupent de manière temporaire des postes déjà menacés par l’IA – comme dans les ventes ou aux restaurants. Ceci n’est pas trop préoccupant, car ces jeunes poursuivent normalement des études postsecondaires et finissent souvent par occuper des postes dans d’autres secteurs moins susceptibles à l’automatisation. Par contre, les jeunes qui ne poursuivent pas d’études postsecondaires sont à haut risque de ressentir des effets négatifs de la montée de l’IA, car, sans instruction supplémentaire, ils ne sont pas qualifiés aux postes moins menacés. Qui plus est, les jeunes détenant un diplôme postsecondaire possèdent davantage de compétences transversales, très recherchées par les employeurs ; des compétences qui ne sont d’ailleurs pas encore maîtrisées par l’IA. L’équipe a analysé la répartition de la population vulnérable à l’automatisation selon le plus haut niveau d’études, et a découvert que le groupe sans diplôme représentait 27 % de la population vulnérable, alors les deux groupes ayant des diplômes (collégial et universitaire) ne représentaient que 14 % et 8 %, respectivement.

Les métiers exigeant un diplôme postsecondaire sont quand même touchés, mais d’une manière différente
Pour bon nombre de ces postes, l’avancée de l’IA pourra changer le métier, sans forcément le supprimer, comme c’est le cas pour d’autres métiers (caissier, par exemple). Ces métiers risquent de changer de façon à ce que les tâches effectuées par les travailleurs changent afin de leur permettre de faire d’autres tâches que l’IA n’en est pas capable. Ainsi, l’IA est perçue comme complémentaire et elle aurait une valeur ajoutée à métiers, permettant à l’économie québécoise d’être plus compétitive et productive. 

Pour que l’IA augmente la productivité de l’économie, elle ne doit pas être employée que pour remplacer les humains
Certes, I’IA a déjà supprimé des métiers, et elle en supprimera d’autres. Mais les entreprises doivent également utiliser l’IA afin de réduire des tâches qui sont mieux accomplies par l’IA afin de libérer leurs salariés pour faire d’autres tâches plus complexes et plus gratifiantes, rendant ainsi l’entreprise plus compétitive et efficace. Finalement, ce changement provoquera la création des emplois de ceux et celles offrant des services liés à l’usage de l’IA et à la transformation numérique.

Pourquoi c’est important

De telles études offrent une perspective essentielle aux organisations comme le CCF, ainsi qu’aux décideurs politiques, nous aidant à faire avancer nos réponses collectives par rapport aux changements engendrés par l’IA générative. Souvent, les avis par rapport à ce qu’il faut faire pour soit protéger les emplois, soit encourager les entreprises à innover sont très partagés, ce qui conduit à la création des politiques peu cohésives. Cette étude nous montre qu’il y a bel et bien un espace pour le dialogue. 

Contexte utile, face aux changements à venir
Il est toujours facile de croire que l’arrivée d’une nouvelle technologie de rupture finira par provoquer un grand exode des travailleurs et travailleuses du marché du travail, d’où l’importance de telles études qui nous rappellent que la réalité a toujours été autrement. En effet, chaque génération a perturbé le marché du travail en offrant une nouvelle technologie pour rendre les tâches plus efficaces et ceci a engendré le remplacement des travailleurs humains par les machines, mais le résultat global de telles transformations a aussi été la création de nouveaux emplois.

État des compétences :
L’IA au service de l’écosystème du développement des compétences

Les outils d’IA appuyés par le CCF ont amélioré les résultats en matière d’adéquation des compétences, d’orientation du développement de carrière et de recrutement. L’efficacité générale de ces outils a été renforcée par la reconnaissance et l’atténuation des préjugés et de la discrimination inhérents à ces technologies.

Fournir des actions politiques concrètes
Malgré la création de nouveaux emplois, il est essentiel de constater les menaces que présente l’IA à certains travailleurs qui ne peuvent pas facilement se requalifier pour un autre emploi. Les décideurs politiques doivent prendre ceci en considération, et créer des programmes de reformation ciblés sur les groupes de travailleurs les plus vulnérables. 

Un cadre méthodologique pour d’autres études canadiennes
Quelles seront les conséquences sur le marché du travail de chaque province et territoire canadien ? Cette étude nous propose une méthodologie tout à fait adaptée aux contextes actuels canadiens et le moment est propice d’agir. Les décideurs politiques devraient se pencher sur le financement de telles études afin de mieux comprendre ce dont auront besoin les travailleurs de leur province ou leur territoire.

Rapport de recherche complet

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Répercussions de l’automatisation et de l’IA sur la main-d’œuvre au Québec

Rapport de Perspectives

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Comment Citer Ce Rapport
Richter, S. (2024). Project Insights Report : Impacts de l’intelligence artificielle pour l’emploi, la productivité et le développement des compétences au Québec, Institut du Québec. Toronto : Future Skills Centre. https://fsc-ccf.ca/fr/recherche/impact-of-ai/