État des compétences

L’engagement efficace des employeurs dans le développement des compétences – De la rhétorique aux solutions

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Emplacements

Partout au Canada

Publié

Novembre 2023

Collaborateur

Steven Tobin,
Conseiller stratégique au CCF

Perspectives Clés

Pour remédier aux pénuries de main-d’œuvre et de compétences, il est essentiel d’aider les employeurs à surmonter les obstacles structurels à l’investissement dans la formation.

L’engagement actif des employeurs tout au long du cycle de vie des projets de développement des compétences, de la conception à l’évaluation en passant par la mise en œuvre, est essentiel à la réussite de tout projet de formation.

Des organisations intermédiaires bien dotées et dignes de confiance, qui coordonnent les efforts entre les parties prenantes, peuvent contribuer à atténuer les contraintes de capacité des employeurs, en particulier pour les PME, et à améliorer la conception des programmes.

L’enjeu

Les pénuries de main-d’œuvre et de compétences, autrefois considérées comme cycliques et localisées, sont devenues structurelles et généralisées.

Le marché du travail post-pandémique du Canada a été largement caractérisé par une forte croissance de l’emploi. Cette situation, conjuguée au vieillissement de la population et à l’évolution des préférences de la main-d’œuvre, entre autres, a entraîné des pénuries persistantes de main-d’œuvre et de compétences dans la plupart des régions, des secteurs et des professions. En fait, 80 % des principaux employeurs éprouvent des difficultés à trouver de la main-d’œuvre qualifiée.

Cette situation a entraîné un certain nombre de difficultés et pose des risques considérables, notamment une baisse de la productivité, un ralentissement de l’adoption des technologies et une incapacité à mettre en œuvre les plans d’entreprise. Dans des secteurs comme les soins de santé, le logement et les énergies renouvelables, les pénuries de compétences compromettent les objectifs sociaux et environnementaux.

Dans le même temps, de nombreux professionnels canadiens restent au chômage, sous-employés ou totalement absents du marché du travail. L’accès à des possibilités d’amélioration et de requalification des compétences profiterait non seulement à ces personnes, mais aussi aux employeurs et à la société dans son ensemble. 

La persistance des pénuries et des inadéquations de compétences a soulevé des questions quant aux raisons pour lesquelles les employeurs canadiens investissent moins dans la formation par employé que leurs homologues de l’OCDE. Les recherches et les données du portefeuille du CCF font ressortir un certain nombre de facteurs critiques qui sous-tendent les investissements comparativement faibles du Canada en matière de formation :

  • L’économie canadienne est composée d’une part importante de PME qui manquent de temps et de ressources pour organiser et mettre en œuvre des formations en cours d’emploi ;
  • Les coûts de formation initiaux peuvent être prohibitifs, rendant souvent le retour sur investissement faible ou négatif ;
  • Certains s’inquiètent du fait qu’une grande partie des besoins de formation ne sont pas propres à l’entreprise, ce qui fait courir le risque que si les employeurs perdent du personnel au profit de leurs concurrents, ils perdent également ces investissements ;
  • Les PME dépendent davantage de l’apprentissage informel, sur le lieu de travail, pour répondre à leurs besoins en matière de compétences ; et
  • Une formation efficace, notamment pour les compétences émergentes, nécessite des efforts considérables et du temps pour assurer la liaison avec les fournisseurs d’éducation et de formation. Une situation qui n’est qu’exacerbée dans les PME où les ressources sont déjà limitées.

Ce que nous examinons

Les employeurs sont engagés à des degrés divers dans la conception et la réalisation de la grande majorité du portefeuille de projets innovants du CCF. Cet aperçu thématique sur l’état des compétences examine plus en détail une série de projets qui ont impliqué les employeurs et testé des approches visant à lever les obstacles à l’amélioration des compétences sur le lieu de travail. Ainsi, le projet Transforming Skills and Talent Acquisition in Canadian Cybersecurity (Transformer l’acquisition des compétences et des talents dans le domaine de la cybersécurité au Canada) s’appuie sur un partenariat avec les employeurs pour offrir une formation en cybersécurité aux Canadiens issus de milieux traditionnellement sous-représentés. Ou encore les projets de Rémunération en fonction du rendement dans l’industrie manufacturière ou les projets Formation et perfectionnement rapides du personnel sur le lieu de travail qui testent l’efficacité et l’extensibilité de nouveaux modèles et de l’apprentissage sur le lieu de travail comme moyen d’accroître la participation à la formation. D’autres projets, comme la formation professionnelle parrainée par l’employeur, ont passé en revue les meilleures pratiques internationales pour tirer des enseignements de la formation parrainée par l’employeur.

L’examen de ces projets et d’autres projets CCF impliquant des employeurs dans des initiatives reliées aux compétences a permis d’explorer un certain nombre de pistes et de questions de recherche, notamment :

  1. À quoi ressemble un engagement efficace des employeurs dans le développement des compétences ? En d’autres termes, le mode d’implication des employeurs (rôle consultatif ou rôle de co-concepteur) donne-t-il de meilleurs résultats ?
  2. Comment remédier aux contraintes de capacité des employeurs, en particulier des PME, afin d’améliorer le degré et la qualité de l’engagement ? 
  3. Quels sont les principaux ingrédients qui permettent de garantir que la formation professionnelle est alignée sur les besoins du secteur et de l’entreprise, tout en gardant à l’esprit que les entreprises se livrent une concurrence, souvent contre-productive, pour attirer les talents ?

Ce que nous apprenons

L’ensemble des projets de recherche et des projets axés sur les compétences du CCF révèlent plusieurs leçons essentielles et interdépendantes sur la manière de mieux tirer parti de l’engagement des employeurs pour assurer le succès de l’acquisition de compétences :

La participation active et volontaire à la conception et à la mise en œuvre des projets est essentielle à leur réussite.
Trop souvent, les employeurs ne sont pas pris en compte lors de l’élaboration de nouveaux programmes de formation professionnelle. Les projets risquent fort d’échouer s’ils n’impliquent pas activement les employeurs dès le départ.

Un certain nombre de projets qui incluaient indirectement des employeurs dans le cadre de leurs activités, par exemple pour des stages intégrés au travail ou des formations sur le tas, n’ont pas été en mesure de recruter un nombre suffisant d’entreprises pour remplir les tâches prévues, qui comprenaient les objectifs globaux de l’intervention.

Cela signifie que les employeurs doivent être directement engagés en tant que participants à part entière tout au long du cycle de vie du projet, depuis sa conception jusqu’à sa mise en œuvre. Il est important que les employeurs qui ont un intérêt direct dans la recherche et l’élaboration d’une solution soient la clé de la réussite globale du projet.

Fournir un soutien initial et régulier aux employeurs
Le pilotage de solutions efficaces implique souvent l’élaboration d’approches personnalisées à forte intensité de ressources pour répondre aux besoins des employeurs en matière de compétences. L’élaboration de telles solutions nécessite beaucoup de temps de gestion. En effet, la difficulté de recruter des entreprises pour participer à des solutions réside en grande partie dans le manque de capacités en termes de temps et de ressources. Toutefois, il a été démontré qu’une organisation intermédiaire dotée de ressources suffisantes et digne de confiance, qui dirige, gère et coordonne les parties prenantes (employeurs, établissements de formation et agences gouvernementales), peut contribuer à atténuer les contraintes de capacité des employeurs, notamment des PME.

En outre, le fait de disposer d’une ressource de cette nature dès la phase de lancement d’un projet contribuera au recrutement efficace d’employeurs qui, autrement, ne participeraient peut-être pas.

Si ces premiers efforts permettent d’obtenir l’adhésion des employeurs, les efforts visant à fournir une aide directe au placement et à la formation des personnes peuvent contribuer grandement à améliorer les résultats. Il peut s’agir d’aider les employeurs à organiser des stages ou d’engager des professionnels de l’industrie ayant une expérience directe en tant que formateurs techniques pour dispenser une formation sur le lieu de travail. En tant qu’objectif intermédiaire, les programmes complémentaires de « formation des formateurs » ont également démontré quelques signes d’aide à cet égard. Toutefois, pour que la solution soit durable, il faudra que l’entreprise ait la capacité interne d’adopter la solution. Cela devrait également impliquer, dans la mesure du possible, une capacité interne à collecter des données et à s’assurer que l’apprentissage est mis en œuvre.

Équilibrer les besoins régionaux et ceux des entreprises
L’évaluation des besoins en compétences des employeurs doit s’inscrire dans une perspective économique régionale large afin d’améliorer les résultats individuels des stagiaires et de renforcer la résilience des entreprises de la région. En particulier, il est essentiel de lier le contenu et les voies de développement des compétences aux secteurs en croissance dans la région.

Une telle approche va toutefois à l’encontre des préoccupations des entreprises concernant les risques de perte de talents. Par conséquent, le fait de réunir un ensemble diversifié d’employeurs de la région contribuera à atténuer ces préoccupations grâce à la mise en commun des risques. Un échantillon représentatif d’employeurs est également le mieux placé pour identifier les besoins plus larges en matière de compétences. Toutefois, la mise en œuvre efficace d’approches collaboratives ne doit pas sous-estimer le temps nécessaire à l’établissement et au maintien des relations et de la confiance.

Dans le même temps, les formations de courte durée sont plus efficaces lorsqu’elles sont adaptées aux besoins de l’entreprise. Même au sein d’un secteur donné, les besoins particuliers des entreprises varient considérablement en fonction du stade de croissance et de développement, et les besoins de formation doivent être adaptés en conséquence.

Ensemble de compétences complémentaires : Aller au-delà des exigences techniques 
Les interventions de formation technique axée sur le travail sont plus efficaces lorsqu’elles dotent également les participants de compétences non techniques. Dans ce cas, il y a des gains d’efficacité lorsque différents secteurs travaillent en collaboration pour fournir et accréditer des compétences non techniques (et techniques d’ailleurs) qui sont demandées. Les efforts de cette nature peuvent également répondre à la réticence des entreprises à investir dans la formation par crainte d’une rotation du personnel, tout en permettant de répondre aux besoins régionaux et intersectoriels en matière de compétences.

Pourquoi c’est important 

Les pénuries de main-d’œuvre et de compétences ont des effets très divers sur les Canadiens. Au niveau macroéconomique, elles freinent les progrès économiques, environnementaux et sociaux du Canada. Au niveau microéconomique, l’incapacité d’attirer, de former et de retenir des travailleurs qualifiés a des effets négatifs sur la rentabilité et la compétitivité des entreprises. Au niveau individuel, le sous-emploi empêche les gens de réaliser pleinement leur potentiel.

Toutes les parties prenantes, y compris les gouvernements, les formateurs et les éducateurs, les professionnels de l’orientation, les organisations à but non lucratif, les individus et les employeurs, doivent prendre des mesures pour contribuer à résoudre ces problèmes persistants.

Les employeurs jouent un rôle essentiel dans la réussite des initiatives de renforcement des compétences sur le lieu de travail dynamique d’aujourd’hui. Les employeurs sont, après tout, les gardiens des talents et sont les mieux placés pour identifier les compétences les plus nécessaires aujourd’hui et à l’avenir. 

Les employeurs sont néanmoins confrontés à un certain nombre d’obstacles qui, s’ils étaient levés, faciliteraient et encourageraient une plus grande valorisation des compétences. Il existe un certain nombre de mesures à prendre pour renforcer l’engagement en faveur de l’emploi et, ce faisant, améliorer la conception, la mise en œuvre et les résultats des initiatives de formation. 

Combinées, ces approches proactives contribueront à garantir que les efforts de formation sont ciblés, pertinents et donnent des résultats valables.

Les prochaines étapes

Le CCF continuera à recueillir des données sur les projets en cours afin de mieux comprendre ce qui fonctionne, pour qui et dans quel contexte. 

Dans le même temps, nous continuons à travailler activement pour lever les obstacles systémiques auxquels les employeurs sont confrontés pour s’engager de manière plus intégrée dans la conception et la mise en œuvre de la formation professionnelle. Par exemple, nous testons la meilleure façon de tirer parti de la technologie pour réduire la fragmentation entre les acteurs du secteur. 

Les efforts futurs porteront davantage sur les PME et les contraintes qui les empêchent d’investir pour répondre à leurs besoins en compétences, que ce soit par le biais de l’amélioration et de la requalification des compétences ou du recrutement. Il s’agira de continuer à piloter des approches qui promettent de réduire efficacement les obstacles auxquels les PME sont confrontées en termes de temps, d’argent et de données. Par exemple, un certain nombre de projets en cours de développement financés par le CCF cherchent à exploiter les économies d’échelle dans le domaine de la formation et du développement des compétences afin de remédier aux contraintes de capacité des PME. 

Nous soutiendrons également les efforts visant à développer de meilleures données au Canada sur le parrainage de la formation par les employeurs (en particulier les PME), et nous aiderons les Canadiens à mieux comprendre comment les PME prennent leurs décisions d’investir ou non dans les compétences.

Enfin, nous testons une série de mécanismes innovants nécessaires pour promouvoir une meilleure collaboration et un engagement efficace entre les différents acteurs, et pas seulement les employeurs, afin de tirer des enseignements au profit de l’ensemble de l’écosystème. 

Des questions sur notre travail ? Souhaitez-vous avoir accès à un rapport en anglais ou en français ? Veuillez contacter communications@fsc-ccf.ca.

Comment Citer Ce Rapport
Tobin, S. (2023) Rapport de perspectives de projet : L’engagement efficace des employeurs dans le développement des compétences – De la rhétorique aux solutions. Toronto : Centre des Compétences futures. https://fsc-ccf.ca/fr/projets/state-of-skills-employers/

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