Perfectionnement de la main-d’œuvre en vue d’une économie propre
Si le Canada entend éviter les terribles scénarios de changement climatique prédits par les scientifiques, notre activité économique doit devenir plus durable.
Bien que la proportion des émissions mondiales de dioxyde de carbone ne soit que de 1,9 % au Canada ; comme le soulignent souvent les nihilistes du climat, nous sommes tout de même le septième plus grand contributeur de CO2 et nous devrons changer autant, sinon plus, que la plupart des autres pays.
Le Canada a ainsi l’occasion d’élaborer et d’exporter des solutions pour faciliter la transition mondiale vers des pratiques de croissance économique plus durables. Les technologies fabriquées au Canada ouvrent déjà la voie à une économie mondiale plus propre, avec de nouveaux matériaux de batterie nanostructurés pour les véhicules hybrides, des circuits photovoltaïques de pointe pour les panneaux solaires souples, des photocatalyseurs pour la filtration de l’eau et des dispositifs de capture et de stockage du carbone pour la séquestration du CO2.
Toutefois, l’innovation et l’adoption de ces technologies nécessitent le développement de nouvelles compétences et la collaboration entre les métiers traditionnels pour les intégrer dans les systèmes existants. À mesure que de nouvelles entreprises et de nouveaux secteurs émergent dans l’économie canadienne pour répondre à cette opportunité, et que les entreprises existantes s’adaptent, la main-d’œuvre canadienne doit simultanément évoluer. Des activités, des technologies, des services et des processus économiques nouveaux et durables seront à l’origine de cette évolution, et ce de trois manières principales :
- Augmenter la demande d’emploi dans certaines professions existantes sans modifier de manière importante le travail et les exigences de la main-d’œuvre de ces professions. Par exemple, la demande accrue d’installateurs de lignes électriques et de réparateurs liée à l’efficacité énergétique et à la modernisation des infrastructures. Considérez ces professions comme faisant partie d’un groupe dont la demande est simplement augmentée par une nouvelle activité économique qui s’avère être durable.
- La modification des tâches, des compétences, des connaissances, des titres de compétences et des exigences de la main-d’œuvre de certaines professions dans une mesure importante créera ainsi un besoin de nouvelles compétences. Par exemple, cela pourrait prendre la forme d’une amélioration des connaissances requises en matière de matériaux et de construction à haut rendement énergétique, ainsi que des compétences liées à l’intégration des technologies durables dans la conception esthétique des bâtiments. Ce groupe de professions se transformera de manière importante grâce à l’inclusion de compétences améliorées par la durabilité, mais ne verra pas nécessairement une augmentation de la demande d’emploi.
- La création de professions entièrement nouvelles avec des exigences uniques en matière de travail et de main-d’œuvre. Par exemple, les techniciens de maintenance des éoliennes, les spécialistes de l’information géospatiale et les contrôleurs de la gestion de l’énergie. Cette catégorie de professions peut être issue d’activités durables entièrement nouvelles ou de professions existantes qui changent si radicalement que de nouveaux rôles sont nécessaires.
Hormis ces trois catégories de changements professionnels, il existe également des effets régionaux. En effet, les changements liés à la durabilité de l’économie océanique s’opéreront principalement sur les côtes, dans des professions telles que les ingénieurs océaniques et les écologistes marins. Cela souligne la nécessité d’une formation ciblée pour perfectionner les compétences de la main-d’œuvre dans des segments spécifiques de l’économie propre.
Les programmes de formation et d’éducation existants, dans leur état actuel, seront probablement suffisants pour faciliter les changements dans le premier groupe de professions. De même, le paradigme éducatif actuel de l’enseignement post-secondaire formel sera probablement capable de s’adapter à la formation de nouveaux types de spécialistes ; toutefois, les entreprises privées devront collaborer de manière constructive avec le monde universitaire pour que ces programmes soient aussi efficaces que possible.
L’innovation est un moteur de la demande pour le plus haut niveau de compétences. À mesure que le rythme d’adoption des technologies s’accélère, les lacunes en matière de compétences continueront de se creuser et la combinaison de compétences changera d’une profession à l’autre dans les prochaines années.
En 2022, le Canada a lancé un appel à propositions d’un montant maximal de 55 millions de dollars pour des projets qui contribueront à développer les talents pour l’économie propre du Canada. Les établissements d’enseignement postsecondaire mettent en place des « programmes de transition » permettant aux diplômés actuels d’obtenir des diplômes et des certifications plus poussés afin d’ouvrir de nouvelles voies professionnelles vers l’économie propre. Des programmes et centres de carrière régionaux (dont plusieurs pour les communautés autochtones) proposent des microcertifications dans les domaines de la modélisation, de la gestion, de l’exploitation, des services et de la vente d’énergie.
C’est un bon début, et cela peut aider à combler les lacunes que des diplômes plus longs auront du mal à combler. Les entreprises canadiennes doivent également s’engager à soutenir les possibilités d’apprentissage et de formation en cours d’emploi afin d’accélérer l’adoption de technologies et de pratiques durables. En fin de compte, cependant, une stratégie globale de compétences durables sera nécessaire si le Canada veut respecter ses engagements en matière de changement climatique, sans parler de la concurrence sérieuse dans une économie mondiale plus durable.
Darren Gresch est associé principal en Recherche, Innovation et Technologie, au Conference Board du Canada. Alain Franq est le directeur, en Innovation et Technologie, au Conference Board du Canada.
Les points de vue, les réflexions et les opinions exprimés ici sont ceux de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement le point de vue, la politique officielle ou la position du Centre des Compétences futures ou de l’un de ses membres du personnel ou des partenaires du consortium.